Remesas au Mexique : Tiendas 3B bouscule Oxxo et Walmart, mais à quel prix ?

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Tiendas 3B veut transformer le paiement des remesas au Mexique. Saviez-vous comment ils comptent détrôner Oxxo et Walmart ? Mon analyse révèle leurs secrets.

Quand les remesas révolutionnent la proximité : l’incroyable pari de Tiendas 3B

Vous connaissez sûrement ces petites boutiques oranges qui fleurissent partout au Mexique. Mais derrière le sourire du caissier et les rayons de produits bon marché se trame une ambitieuse révolution : Tiendas 3B veut devenir LE point de retrait privilégié pour les remesas. En tant qu’observateur passionné des mutations du commerce mexicain depuis plus de quinze ans, j’ai rarement vu un projet aussi audacieux… et plein d’enseignements pour comprendre ce que vivent aujourd’hui des millions de familles.

Les remesas, nerf vital de milliers de foyers mexicains

Difficile d’exagérer l’importance des remesas au Mexique. En 2024, selon le Banco de México, près de 65 milliards de dollars sont venus soutenir l’économie locale—un record absolu ! La quasi-totalité provient des États-Unis via plus de 20 millions de migrants. Ce flux irrigue chaque mois les dépenses essentielles dans tout le pays.

Ce qui m’a frappé lors de mes visites terrain (notamment dans l’État de Puebla en début d’année), c’est à quel point le parcours pour retirer cet argent peut s’avérer longuet ou compliqué : files d’attente interminables chez les banques traditionnelles, horaires peu adaptés, manque d’agences dans certaines zones rurales… Or c’est justement là que des enseignes comme Oxxo ou Walmart ont changé la donne.

Le coup de poker stratégique : pourquoi 3B mise sur les remesas

Pourquoi une enseigne comme Tiendas 3B—connue avant tout pour ses prix bas et son expansion rapide—voudrait-elle s’aventurer sur ce terrain ? L’explication est triple :

  • Augmenter la fréquence client : Plus besoin d’aller ailleurs retirer son argent—on passe chez 3B plusieurs fois par semaine pour faire ses courses ET récupérer sa remesa.
  • Saisir une manne sous-exploitée : Contrairement aux banques ou même à Oxxo (qui s’appuie déjà sur Western Union), beaucoup d’épiceries restent absentes du circuit.
  • Renforcer leur rôle social : Dans certains quartiers périphériques où je me rends régulièrement, la supérette devient vite un pilier communautaire.

Anthony Hatoum, leur patron visionnaire, résume bien l’approche : « Je ne m’intéresse à aucun business qui ne gagne pas d’argent ». Pragmatique mais lucide – car ici il ne s’agit pas juste d’un service annexe, mais d’un relais essentiel pour fidéliser une clientèle populaire parfois exclue du système bancaire classique.

Une guerre discrète entre géants… et petits commerçants oubliés ?

La compétition promet d’être féroce. Avec plus de 2 770 magasins fin 2024 (et un objectif à +550 en 2025 !), Tiendas 3B fait jeu égal avec Oxxo en termes de maillage territorial. Les autres chaînes (Neto ou Waldo’s) restent loin derrière. J’ai constaté lors d’entretiens avec quelques gérants indépendants que cette nouvelle concurrence les inquiète davantage qu’une simple baisse des ventes alimentaires : « Si tout le monde va retirer son argent chez les grands groupes, nous perdrons encore un peu plus notre utilité », m’expliquait Jesús Martínez à Atlixco.

Un autre enjeu majeur : la sécurité. Manipuler régulièrement d’importantes sommes expose forcément caissiers et clients à des risques accrus. Certaines familles préfèrent parfois laisser dormir leur remesa quelques jours plutôt que braver l’insécurité à certains horaires. D’où l’intérêt—à mon sens trop peu abordé par les médias—d’adapter vraiment la logistique (heures élargies, sécurité renforcée) si l’on veut éviter les écueils rencontrés ailleurs.

Économie informelle et exclusion financière : la revanche des petites gens ?

Au-delà du business pur et dur, cette initiative éclaire une réalité souvent invisible :

  • Plus du tiers des Mexicains adultes restent exclus du secteur bancaire traditionnel (ENIF/INEGI), faute de documents ou par méfiance envers les institutions.
  • Pour eux, pouvoir encaisser une remesa chez leur épicier préféré change vraiment la donne (horaires souples, procédures rapides).
  • Cette accessibilité accrue facilite aussi l’achat immédiat – créant ainsi un cercle vertueux pour l’économie locale… mais soulevant aussi la question du « tout sous le même toit » et ses dérives potentielles (dépendance accrue à une seule enseigne ?).

J’ai pu observer dans plusieurs agglomérations que cette proximité était appréciée… tant qu’elle restait synonyme de choix réel.

Innovations digitales et alliances inattendues : vers un nouvel écosystème ?

Techniquement parlant, inutile que chaque magasin devienne banque ! Les partenariats avec Xoom, Ria ou MoneyGram pourraient suffire. C’est probablement ce modèle hybride qu’envisage Tiendas 3B : capitaliser sur sa présence physique ET profiter des avancées fintech sans lourdeurs réglementaires bancaires.

En coulisses circulent déjà des rumeurs autour d’intégrations possibles avec des applications mobiles permettant pré-notification du retrait ou paiement direct en caisse. Certains établissements testent même la conversion directe en bons cadeaux ou produits spécifiques lors du retrait – ce qui pourrait déplaire aux puristes mais correspond bien aux habitudes locales observées depuis la pandémie.

Quel impact demain sur nos habitudes quotidiennes ? Mon verdict personnel…

Ayant moi-même vécu en zone semi-rurale au sud du DF pendant deux ans récemment, je mesure ce que représente la simplicité offerte par ces nouveaux points relais — surtout quand il n’y a pas une agence bancaire digne de ce nom à moins de vingt kilomètres !
Mais attention aux effets pervers : concentration excessive des services entre quelques mains privées ; disparition progressive du lien social incarné par les petits commerçants historiques ; risques accrus liés au volume de liquidités circulant hors circuit formel.
À mon avis — fort des discussions menées auprès d’usagers comme d’experts locaux — le succès viendra surtout de la capacité à écouter vraiment les besoins quotidiens : rapidité oui… mais aussi humanité et sécurité !
Et vous — pensez-vous que votre superette deviendra bientôt aussi votre "guichet" principal ?
Pour creuser encore ces enjeux sociétaux et suivre leur évolution en temps réel, n’hésitez pas à consulter l’analyse approfondie sur Bloomberg Línea.

Questions fréquentes

Est-ce que toutes les succursales Tiendas 3B proposeront le service dès son lancement ?

Non – le déploiement se fera progressivement selon la demande locale et après accord avec leurs partenaires technologiques (comme MoneyGram). Certaines régions pourraient donc patienter quelques mois supplémentaires avant accès généralisé.

Quels documents faudra-t-il présenter pour retirer sa remesa chez Tiendas 3B ?

Généralement il faudra une pièce d’identité officielle (INE ou passeport) ainsi qu’un code fourni par l’émetteur international – comme cela se pratique déjà chez Oxxo ou Walmart.

Peut-on payer directement ses achats avec sa remesa sans passer par la caisse ?

Certaines options innovantes sont envisagées (bons cadeaux instantanés…), mais initialement il sera nécessaire de passer par la caisse pour retirer puis régler ses achats normalement avec l’argent reçu.

Photo by Danielle-Claude Bélanger on Unsplash

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