Pilar Eyre, littérature et vieillissement : ce que Cordoue m’a appris sur le courage d’écrire à tout âge

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Et si l’on découvrait, à travers Pilar Eyre, comment Cordoue inspire le refus du conformisme et la passion de créer toute sa vie ?

Quand la littérature défie le temps : regards croisés entre Pilar Eyre et Cordoue

Je me souviens d’une conversation au détour d’une rue pavée de la Judería où une amie me confiait : « María, dans cette ville on ne vieillit pas… On s’étoffe. » Cette idée me revient à l’esprit en découvrant le parcours et les mots de Pilar Eyre. À travers son œuvre comme à travers ses interviews récentes (notamment celle donnée pour ‘Libros y Cosas’), elle incarne ce refus lumineux du conformisme lié à l’âge. C’est un écho direct à ce que je ressens ici, à Cordoue : le courage d’écrire, de créer, d’aimer — sans jamais se laisser enfermer par la notion de "trop tard" ou par l’ombre sourde du "déjà fait".

Le récit comme miroir des âges

Dans ‘Señoras bien’, dernier roman d’Eyre, Andrea doit reprendre les rênes de son cabinet d’architecture alors qu’elle pensait en avoir fini avec les responsabilités. Cet élan inattendu, c’est celui que je croise tous les jours chez tant de Cordouans : des femmes qui relancent un atelier artisanal après 60 ans ; des hommes qui débutent la poésie à 70. Dans ma famille aussi, personne ne s’est jamais arrêté « parce que c’est l’âge ». Ici, on pense comme Eyre : ce ne sont pas les années qui nous freinent mais le renoncement aux projets.

« Ce qui te rend jeune, ce sont les plans, les objectifs et les rêves », rappelle Pilar Eyre. Cette philosophie résonne fort sur les places vibrantes de Cordoue.

Vivre (et écrire) sans peur de l’indignité

La phrase choc d’Eyre – "Je veux vieillir avec indignité !" – m’a fait rire puis réfléchir. Loin des clichés touristiques figés dans l’Andalousie éternelle et noble, la vraie Cordoue est une ville indocile. On y célèbre la liberté d’être soi-même jusque dans ses extravagances ou ses faux-pas — surtout quand il s’agit de raconter sa vérité. J’ai souvent été frappée par cette énergie lors des tertulias littéraires locales : ici on débat avec ferveur de littérature féminine, des critiques parfois sexistes du milieu éditorial…

Comme Eyre l’explique avec une pointe d’ironie sur la manière dont sont traitées les autrices prolifiques :

« Les critiques valorisent celles qui écrivent peu… Mais moi j’écris parce que j’en ai besoin ! »

C’est exactement cette sincérité qu’on retrouve dans l’artisanat local ou même dans le flamenco cordouan : le refus des cases étroites où voudraient nous enfermer les normes sociales.

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La mémoire vive : perdre et renaître au fil des pages

Pilar Eyre partage une anecdote bouleversante : alors que son mari agonisait à l’hôpital, elle était tellement plongée dans un livre qu’elle n’a pas entendu son dernier souffle. Ce mélange de culpabilité douce et d’amour infini pour la lecture me touche particulièrement — je crois qu’à Cordoue, beaucoup comprendraient ce dilemme douloureux entre présence physique et voyage intérieur offert par les livres.

Ici aussi la mort côtoie discrètement nos ruelles anciennes ; chaque pierre recèle des histoires interrompues et pourtant prolongées par nos récits partagés autour d’un café ou sur une place ombragée.

Résister au diktat de l’âge : inspirations cordouanes pour aujourd’hui

Ce que Pilar Eyre refuse farouchement — être cataloguée selon son âge — c’est aussi une bataille menée silencieusement en Andalousie depuis toujours. De nombreux artistes locaux repoussent les frontières traditionnelles ; chaque printemps voit éclore non seulement des patios mais aussi mille nouveaux projets menés par ceux qui ne veulent pas céder au "repos mérité" imposé.

Quelques idées inspirantes croisées récemment :

  • Une retraitée devenue guide bénévole pour faire vivre le patrimoine juif oublié (Casa Sefarad).
  • Un ancien professeur qui organise chaque mois un cercle littéraire ouvert aux expatriés francophones.
  • Des artisans relançant leur activité en ligne grâce au bouche-à-oreille local…
  • Et tant d’autres histoires dignes d’un roman !

Pourquoi continuer ? Le sens retrouvé grâce aux projets…

Eyre affirme que la vocation seule ne suffit pas à donner un sens renouvelé à la vie ; il faut nourrir ses illusions et multiplier ses envies futures. C’est exactement ce que j’observe auprès des voyageurs curieux venant découvrir Cordoue hors saison : ils repartent changés parce qu’ici on apprend encore (et toujours) à désirer quelque chose pour demain.

Pour aller plus loin sur ces questions très actuelles du vieillissement actif en Espagne : Lire ce dossier complet sur eldiario.es.

Le coin des questions

### Pourquoi Pilar Eyre rejette-t-elle le terme “âge” ou “âgisme” ?
Parce qu’il enferme et stigmatise inutilement ; elle préfère parler de parcours ou de projets personnels plutôt que d’âge chronologique.

### Que peut-on retenir du modèle cordouan face au vieillissement ?
La culture locale privilégie le projet continu ; il n’y a pas vraiment “d’après” mais une suite naturelle entre apprentissage, transmission et nouveaux rêves.

### Comment intégrer ces idées lors d’un séjour à Cordoue ?
Participer aux activités intergénérationnelles organisées dans certains musées ou associations locales est un excellent point de départ ; osez discuter avec les habitants âgés lors d’une visite guidée ou dans un café animé !

Photo by dxiane on Unsplash

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