12 Curieux de musique contemporaine à Séville ? Je partage les secrets d’Óscar Martín et du Zahir Ensemble, bien au-delà des clichés habituels.Une aventure musicale hors des sentiers battus : ma rencontre avec Óscar Martín Il y a quelque chose de fascinant à écouter un pianiste comme Óscar Martín parler de son art. Au détour d’un café sous les arcades ombragées de la Plaza Nueva de Séville, il m’a confié une idée qui m’a marquée : « Il faut savoir laisser respirer l’œuvre. » Cette phrase semble anodine, mais elle bouscule toute notre façon d’aborder la musique – surtout quand il s’agit du répertoire contemporain. Ce n’est pas tous les jours qu’un pianiste chevronné vous raconte comment Hyperklavier de Reinhard Febel remet en question le rôle du piano soliste. Dans cette pièce, le piano cesse d’être le héros romantique que l’on imagine : il fusionne littéralement avec l’ensemble instrumental. Ce n’est plus un duel entre soliste et orchestre, mais un jeu subtil de textures sonores, où l’on ne distingue plus toujours qui joue quoi. Pour moi qui ai grandi dans les ruelles vibrantes de Cordoue, ce mélange m’évoque le tressage vivant des voix lors des fêtes populaires : chaque musicien apporte sa couleur unique sans jamais écraser celle des autres. La transparence sonore : une exigence nouvelle pour l’interprète Martín insiste sur un point que je n’avais jamais vraiment perçu avant d’assister à ses répétitions avec le Zahir Ensemble : « Le pédalier devient chirurgical. Rien ne se cache ; tout doit être transparent… » Cela change profondément la posture du pianiste. On ne peut plus compter sur la virtuosité pure ou les grands effets ; il s’agit plutôt d’une attention extrême au timbre et à la respiration du groupe. Cette rigueur rappelle la discipline du flamenco local – où chaque silence est aussi expressif que la note jouée ! Et pourtant… Même au cœur de ces œuvres novatrices comme Hyperklavier ou les pièces singulières de Janáček (Concertino, Capriccio pour main gauche), subsistent des clins d’œil au passé. Les cadences nostalgiques du troisième mouvement évoquent la tradition sans jamais s’y complaire : on y sent une émotion retenue mais palpable, comme lorsque l’on revisite une ruelle connue après des années d’absence. Vous pourriez être interessé par La Normal : Le nouveau centre chorégraphique de Córdoba recrute ses premiers artistes résidents. 25 juillet 2024 Concert à Madrid pour les victimes de la DANA : Bisbal, Malú… 7 novembre 2024 En coulisses : un disque forgé dans la durée et la complicité Ce qui frappe dans ce nouveau CD signé Zahir Ensemble & Óscar Martín, c’est son mode de fabrication artisanal – loin des enregistrements « industriels ». Chaque œuvre a été enregistrée séparément, nécessitant la réunion patiente de musiciens aux horizons multiples (vents, cordes, percussions…). Cette approche fragmentée donne au disque une énergie particulière : chaque session porte la fraîcheur d’une rencontre renouvelée. J’ai eu la chance d’assister à certains essais dans le labyrinthe sonore du Espacio Turina, et j’y ai senti cette fameuse complicité presque chorégraphique dont parle Martín. Quand le dialogue existe depuis des années entre artistes – comme lui et Juan Manuel Rico –, cela se ressent dans chaque nuance. L’équilibre fragile entre ego et fidélité à l’œuvre Une question me taraudait depuis longtemps : jusqu’où un interprète peut-il imposer sa marque sans trahir la musique ? Martín y répond avec une humilité rare : jouer sur scène permet plus d’audace et même quelques excès pardonnables par l’adrénaline du direct ; mais enregistrer grave tout pour toujours. « Il faut trouver cet équilibre délicat : apporter quelque chose sans écraser l’œuvre… » Ce recul volontaire me rappelle certains artisans cordouans capables d’inventer tout en respectant leur héritage. Ici aussi se joue une transmission fragile entre passé et présent. La scène contemporaine sévillane : promesses et paradoxes Séville regorge de talents formés dans ses conservatoires prestigieux – et pourtant… peu franchissent les portes des concerts contemporains ! Le constat d’Óscar Martín est lucide : Programmes scolaires trop chargés pour permettre aux élèves d’écouter « en vrai ». Manque cruel de salles spécialisées malgré des lieux courageux comme Espacio Turina ou les initiatives innovantes du Taller Sonoro. Une tradition orale (flamenco ou bandas) qui fonctionne encore grâce à l’écoute partagée dès le plus jeune âge – alors qu’en classique on oublie souvent que vivre la musique commence par s’en imprégner ensemble. Tout cela nourrit un paradoxe typiquement andalou : tant de jeunes musiciens formidables mais si peu ancrés dans une vraie vie culturelle locale hors des murs scolaires ! Conseils pratiques pour découvrir (vraiment) la musique contemporaine à Séville À ceux qui veulent sortir des sentiers battus touristiques ou musicaux lors d’un séjour andalou, voici mes astuces inspirées par ces rencontres : Privilégiez les concerts-rencontres animés par les musiciens eux-mêmes : ils expliquent souvent leurs démarches entre deux pièces… Loin du snobisme ! Restez attentif aux festivals ponctuels accueillant créations locales (printemps-été principalement). Osez dialoguer après les concerts avec artistes ou spectateurs passionnés ; ici tout commence par une conversation spontanée autour d’un verre ou sous un patio éclairé tard dans la nuit. Et si vous êtes étudiant·e en musique classique : sortez du carcan scolaire ! Allez écouter ce que jouent vos camarades — ou vos professeurs — en dehors du cadre académique. En définitive : c’est dans ce va-et-vient constant entre transmission traditionnelle et curiosité vers demain que Séville continue de faire battre son cœur musical — parfois discret mais indéniablement vivant… Questions fréquentes Où écouter de la musique contemporaine à Séville ? Les meilleures options restent Espacio Turina pour sa programmation audacieuse et certains festivals annuels portés par Zahir Ensemble ou Taller Sonoro. Pensez aussi aux sessions organisées en marge par les conservatoires supérieurs. Comment profiter pleinement d’un concert contemporain sans être spécialiste ? Venez sans idées préconçues ! Laissez-vous surprendre par les sons nouveaux ; n’hésitez pas à lire le programme avant ou demander directement aux musiciens présents. Existe-t-il des ponts entre flamenco et création musicale actuelle à Séville ? Oui ! Certains compositeurs locaux intègrent peu à peu rythmes flamencos ou couleurs modales andalouses dans leurs œuvres contemporaines — témoignant ainsi de l’esprit métissé propre à cette région. Photo by freestocks on Unsplash ConcertMusique 0 FacebookTwitterPinterestThreadsBlueskyEmail María Fernanda González María est notre journaliste voyage basée à Cordoue. En tant que Cordouane et exploratrice du monde, elle possède un talent particulier pour connecter les voyageurs francophones à l'essence de sa ville. Sur Escapade à Cordoue, María partage ses découvertes, ses conseils d'experte locale et ses récits qui donnent vie au patrimoine et à la culture vibrante de Cordoue et de l'Andalousie. Elle explore aussi bien les ruelles historiques de la Judería que les métropoles lointaines, toujours en quête d'histoires qui relient les gens et les lieux. Ses contributions sont une invitation à voir Cordoue à travers les yeux d'une passionnée, offrant des clés pour un voyage enrichissant en Andalousie. entrée prédédente Livres, jardins et mémoire : Quand un jardin de papier devient un voyage intérieur à Cordoue entrée suivante Fruits à Cordoue : révélations inattendues sur leur âme secrète A lire aussi Córdoba et le violon flamenco: le retour fiévreux... 1 septembre 2025 Pozoblanco, deux générations en une nuit: Alvama Ice... 1 septembre 2025 À Córdoba, mon détour par le hangar “Eiffel”... 1 septembre 2025 Inattendu à Córdoba: Manu Sánchez revient à Cabra,... 1 septembre 2025 À Córdoba, Benamejí en compás: ma nuit au... 31 août 2025 Córdoba flamenco: mes lieux vrais où sentir le... 31 août 2025 Córdoba, Filmoteca: mes secrets pour vivre la rentrée... 30 août 2025 Córdoba, et si une série galicienne réveillait nos... 29 août 2025 Córdoba en Lego: la rentrée comme un local…... 28 août 2025 Córdoba, chirigota del Canijo: la halte immanquable avant... 28 août 2025