Iris Murdoch, l’éthique romanesque : secrets d’une passionnée de Cordoue

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Plonge avec moi dans l’univers d’Iris Murdoch, où le bien et le mal se mêlent en mille nuances—et découvre pourquoi ses romans m’accompagnent lors de mes balades nocturnes à Cordoue.

Iris Murdoch : Une écrivaine hors norme vue depuis Cordoue

Quand on flâne dans les ruelles silencieuses de la Judería ou qu’on s’attarde devant une vitrine de la Calle Gondomar, il m’arrive souvent de penser à Iris Murdoch. Cette femme que ses contemporains surnommaient « la plus brillante d’Angleterre » incarne pour moi cette alliance rare entre l’intellect affûté et une curiosité inépuisable pour l’âme humaine. Sa trajectoire me touche parce qu’elle a réussi ce que j’essaie modestement de faire ici à Cordoue : interroger notre époque en racontant des histoires qui dépassent les frontières.

Le bien et le mal après la guerre : quand la philosophie s’invite dans le roman

Murdoch n’a jamais dissocié littérature et philosophie. Après la Seconde Guerre mondiale, elle percevait l’urgence de repenser le bien et le mal, concepts mis à mal par un monde en ruines. Elle a puisé dans Platon – mais aussi dans les tourments existentiels de Sartre – pour insuffler à ses personnages une épaisseur morale rarement égalée. Dans ‘Le rêve de Bruno’ ou ‘La mer, la mer’, on ne trouve pas des porte-parole philosophiques figés mais des êtres ambivalents qui tâtonnent comme nous tous.

Ce mélange très britannique du comique discret et du tragique existentiel m’évoque certains vieux Cordouans croisés sur les bancs de la Plaza de las Tendillas : ceux qui parlent en énigmes pour mieux masquer leurs failles. Les romans de Murdoch résonnent avec ce parfum d’ambiguïté humaine que je retrouve partout ici – entre ombre et lumière.

Un style mille-feuilles : chaque lecture révèle une nouvelle saveur

Lire Murdoch, c’est accepter d’être surpris. Son style foisonnant superpose intrigues sentimentales (amours impossibles, trahisons, complicités secrètes) et réflexions éthiques profondes sans jamais devenir pesant. Comme un salmorejo andalou revisité avec une pointe inattendue d’agrumes !

Ce que j’aime surtout chez elle ? L’impression permanente qu’un mystère flotte sous la surface réaliste du récit. Ses personnages semblent pris dans des filets invisibles – manipulateurs magnétiques ou victimes consentantes – un peu comme ces légendes cordouanes où tout n’est jamais tout à fait dit…

“On ne savoure pas toutes les couches d’un millefeuille mais c’est justement cette profusion qui donne sa profondeur.”

Harold Bloom saluait son « pouls narratif ». Pour ma part, j’y retrouve ce plaisir enfantin du conte entremêlé à l’exigence adulte du questionnement moral.

Amours libres et zones d’ombre : vie privée versus œuvre publique

La vie sentimentale d’Iris Murdoch fut aussi complexe que ses romans : mariages ouverts (avec John Bayley), amours multiples (hommes et femmes), relations troubles (notamment avec Elias Canetti). Loin des conventions britanniques guindées !

Je suis frappée par la tendresse discrète qui traverse ‘Elegía a Iris’, le témoignage poignant mais pudique de son mari face à la maladie d’Alzheimer qui emporta peu à peu l’esprit si vif de sa compagne. Ce mélange d’humour british face au drame me rappelle les conversations nocturnes entre voisins cordouans quand tout vacille mais qu’on rit quand même.

Un point rarement évoqué dans les articles classiques : Murdoch assumait ses contradictions sans chercher à se justifier ni à s’afficher comme modèle féministe avant l’heure. Cela lui permettait de questionner subtilement le masculin/féminin bien avant que cela ne devienne tendance. Une singularité rafraîchissante aujourd’hui !

Ce que la littérature espagnole doit à Murdoch… et vice-versa !

Bien que peu connue en Espagne (quelques traductions seulement jusqu’à récemment), son influence plane sur certains écrivains ibériques comme Pilar Adón ou Álvaro Pombo. Moi-même, je relis parfois ‘Le livre et la confrérie’ en pensant aux liens invisibles tissés entre amis cordouans d’hier et d’aujourd’hui—ces mêmes liens qui façonnent nos identités collectives.

Murdoch disait vouloir offrir « un roman lisible comme un cadeau pour l’humanité ». Cette humilité pleine d’ambition résonne fort ici, où raconter une histoire autour d’un café sur la Plaza Corredera est toujours un acte politique autant qu’un plaisir partagé.

Pourquoi relire Iris Murdoch aujourd’hui ?

Dans ce monde saturé où tout va trop vite—y compris ici en Andalousie !—les romans polyphoniques de Murdoch sont une invitation précieuse au ralentissement méditatif. On y apprend que derrière chaque choix anodin se cachent des abîmes moraux ; que chaque sourire peut dissimuler une blessure ; que toute trahison recèle aussi sa part de tendresse inavouée.

En 2025, alors qu’on redécouvre petit à petit son œuvre grâce à Impedimenta ou encore via des critiques pointues (The Paris Review), c’est peut-être le bon moment pour donner une seconde chance à cette voix singulière.

Questions fréquentes

### Par où commencer avec Iris Murdoch ?
Je recommande vivement ‘La mer, la mer’, véritable chef-d’œuvre couronné par le Booker Prize ; puis ‘Le prince noir’ si vous aimez les jeux littéraires subtils.

### Peut-on apprécier ses romans sans connaissances philosophiques ?
Absolument ! Même si elle glisse des références profondes, ses histoires restent captivantes et accessibles – laissez-vous simplement porter par ses personnages hauts en couleur.

### Quels thèmes reviennent souvent dans son œuvre ?
Vous trouverez régulièrement des réflexions sur le bien/le mal, la liberté individuelle, les limites du désir ainsi qu’une galerie fascinante de manipulateurs et idéalistes perdus… exactement comme certaines figures mystérieuses croisées aux abords de la mosquée-cathédrale !

Photo by Diane Picchiottino on Unsplash

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