Feria de Córdoba : faut-il interdire les chevaux par grande chaleur ?

A group of horses pulling decorated carriages at the Feria de Córdoba, midday under a harsh sun, photorealistic editorial style, heat shimmer visible, concerned handlers in traditional attire, festive fairground in the background.

Les chevaux à la Feria de Córdoba sont-ils vraiment protégés lors des alertes canicule ? Plongée dans les coulisses d’une tradition qui interroge.

L’ombre brûlante de la tradition : chevaux et chaleur à la Feria de Córdoba

La Feria de Córdoba, c’est un peu comme une fresque andalouse qui prend vie chaque année sous le soleil éclatant du Guadalquivir. Mais derrière l’éclat des costumes et la fierté des carrosses se cache une question brûlante : que deviennent vraiment les chevaux quand la température s’envole au-delà de 40°C ? Moi qui ai arpenté tant de fois ces allées poussiéreuses en plein cagnard, je peux vous dire que le sort des animaux n’a rien d’anodin.

Le débat s’est intensifié cette année avec l’appel du Pacma (Parti animaliste espagnol), qui exige l’interdiction pure et simple de la circulation des attelages pendant les alertes canicule. Leur crainte : voir ces animaux majestueux succomber à des coups de chaleur ou à une déshydratation fulgurante. Pourtant, malgré les mises en garde et le renforcement progressif des normes européennes pour le bien-être animal, il semble que le folklore pèse encore lourd face aux impératifs éthiques.

Au cœur du problème : traditions versus responsabilité

J’ai souvent entendu dire ici : « Les chevaux font partie de la fête depuis toujours ». Certes, mais dans quelles conditions ? Les horaires officiels autorisent les promenades et enganches entre 13h et 20h – pile au moment où l’asphalte vibre sous la fournaise. Les défenseurs des animaux, eux, rappellent que même une courte exposition à ce climat extrême peut avoir des conséquences dramatiques.

Au fil de mes discussions avec vétérinaires locaux et propriétaires d’attelages – parfois eux-mêmes tiraillés entre amour du cheval et respect de la tradition familiale –, un constat revient : l’application concrète des réglementations reste trop souvent floue. Alors qu’à Séville ou Malaga, certains ajustements ont été faits en cas d’alerte orange ou rouge (déplacements réduits voire suspendus), Córdoba tarde à franchir ce cap. On se demande alors si la préservation du patrimoine culturel doit primer sur le bien-être animal… ou si un compromis intelligent n’est pas possible.

Ce que disent la science… et l’expérience du terrain

Sur le plan vétérinaire, les données sont implacables : dès 35°C (et avec une humidité élevée), le cheval peine à réguler sa température corporelle. En 2025, plusieurs études locales ont confirmé une augmentation des incidents liés au stress thermique lors d’événements festifs en Andalousie. Pourtant, chaque année on observe – hélas – quelques effondrements spectaculaires sous le regard choqué des passants.

En discutant récemment avec Antonio Ruiz, propriétaire réputé d’un élevage local (
Association andalouse du cheval
), il m’a confié qu’il a instauré ses propres règles : pauses plus fréquentes à l’ombre, hydratation accrue et limitation stricte lors d’alertes météo. Ces initiatives individuelles restent trop rares. La majorité suit encore le règlement municipal… qui ne prévoit pas explicitement de restrictions selon les niveaux d’alerte météo.

Vers une nouvelle charte éthique pour la Feria ?

Ce paradoxe me fascine : comment préserver ce pan essentiel de l’identité cordouane sans tomber dans l’aveuglement collectif ? Plusieurs voix montent aujourd’hui pour réclamer non pas l’abolition pure (ce que souhaite Pacma), mais un dialogue constructif autour d’une charte éthique adaptée aux réalités climatiques actuelles.

Imaginez si chaque cocheiro (conducteur) recevait une formation sur les signes précoces du stress thermique chez son animal ! Ou si une brigade vétérinaire dédiée pouvait intervenir rapidement en cas de malaise suspect… Des mesures déjà testées ailleurs en Espagne pourraient servir de modèle sans renier l’esprit populaire du festival.

Le site officiel de
la Mairie de Córdoba
suggère timidement quelques adaptations mais reste discret sur un cadre contraignant pour 2025. J’ai croisé plusieurs organisateurs manifestement ouverts à limiter voire reporter certains cortèges si le thermomètre explose. Mais cela suppose une volonté politique ferme – et un vrai changement dans le regard porté sur nos compagnons équins.

Le poids invisible des attentes sociales et économiques

Bien sûr, derrière cette question se cache aussi celle du tourisme. Les calèches magnifiquement décorées attirent chaque année des milliers de visiteurs venus chercher l’image rêvée d’une Andalousie éternelle. Rares sont ceux prêts à admettre que ce spectacle a un prix — souvent payé par les chevaux eux-mêmes.

Mais tout bouge ! Cette saison j’ai vu plusieurs guides touristiques sensibiliser leur groupe aux enjeux climatiques — expliquant pourquoi certaines balades étaient exceptionnellement annulées ou écourtées lors des pics caniculaires. Une évolution lente mais prometteuse.

À terme, il faudra sans doute accepter que nos traditions vivent avec leur temps… ou risquent d’être discréditées par manque d’adaptation aux défis contemporains.

Prendre parti sans juger : mon expérience personnelle

En tant qu’amoureuse du patrimoine vivant mais aussi témoin privilégiée des souffrances animales (parfois cachées sous un vernis festif), je crois sincèrement qu’on peut conjuguer respect culturel et vigilance sanitaire. Pourquoi ne pas imaginer des plages horaires dédiées uniquement aux matinées fraîches ? Ou instaurer un système volontairement transparent où chaque incident serait recensé publiquement ?

Ce n’est ni confortable ni consensuel — j’en conviens ! — mais ce sont précisément ces débats qui font avancer notre société vers plus d’humanité… y compris envers ceux qui n’ont pas voix au chapitre.

Questions fréquentes

Les chevaux sont-ils réellement protégés pendant la Feria lorsqu’il fait très chaud ?

Les protections existent mais restent insuffisantes dès lors que les températures dépassent 40°C ; il appartient surtout aux propriétaires responsables d’agir au-delà du règlement minimal.

Peut-on profiter pleinement de la Feria sans utiliser les calèches ?

Absolument ! De nombreux événements festifs permettent aujourd’hui d’apprécier toute la richesse culturelle cordouane sans recourir systématiquement aux attelages traditionnels.

Que propose Pacma concrètement pour améliorer la situation ?

Le parti plaide pour une interdiction totale pendant les alertes météorologiques ainsi qu’une surveillance accrue ; il milite aussi plus globalement pour la fin de toute traction animale lors des festivités publiques.

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