El Quijote à Cordoue : Pourquoi le relire change-t-il encore notre regard ?

A city street filled with lots of tall buildings

Et si lire El Quijote à Cordoue révélait bien plus que des aventures ? Découvrez comment ce roman classique résonne aujourd'hui dans notre quotidien andalou.

Un classique vivant au cœur de Cordoue

On croit connaître El Quijote, ce livre omniprésent dans les bibliothèques espagnoles et souvent imposé au lycée. Pourtant, chaque relecture – surtout ici à Cordoue, où l’histoire et la langue se vivent au quotidien – m’a révélé quelque chose de nouveau sur moi-même et mon environnement. Contrairement à l’image figée du "classique", ce roman est un miroir aux mille facettes qui évolue avec nous.

Je me souviens de ma première rencontre enfantine avec Don Quichotte : c’était lors d’un été caniculaire chez ma grand-mère. L’odeur du vieux papier se mêlait à celle du jasmin en fleur dehors. Aujourd’hui encore, la voix gouailleuse de Sancho me rappelle celle des anciens du quartier San Lorenzo.

« La palabra ‘clásico’ sugiere algo perfecto, inamovible y lejano, y ‘El Quijote’ no es nada de eso. » (Antonio Muñoz Molina)

Les échos locaux : quand Cervantès parle cordouan

Loin d’être une œuvre lointaine, El Quijote vibre ici d’une familiarité presque troublante. La manière dont Dulcinée prépare le blé ou la façon dont Sancho Panza s’exprime rappellent encore certains gestes ou expressions de nos abuelas et des travailleurs agricoles alentour. À Cordoue, la frontière entre littérature et vie quotidienne s’estompe : on retrouve dans les ruelles blanches de la Judería le goût pour l’ironie tendre et la sagesse populaire qui irriguent chaque page du roman.

La proximité géographique entre la Mancha et l’Andalousie n’y est pas étrangère. Mais il y a aussi cette parenté invisible dans le parler familier — comme si la langue du XVIIe siècle était cousine germaine de celle que j’entendais petite au marché de Corredera.

Un roman expérimental avant l’heure… et terriblement moderne !

Saviez-vous qu’El Quijote fut écrit en deux temps ? La première partie est une mosaïque bouillonnante d’histoires à tiroirs — parfois imparfaite mais follement inventive. Cervantès invente sans cesse ; il joue avec ses lecteurs comme un conteur malicieux lors des veillées d’été.

Dans cette première partie, tout semble possible : récits interrompus brutalement, personnages qui surgissent puis disparaissent… Ce côté « brouillon inspiré » évoque aujourd’hui nos séries préférées où chaque épisode apporte son lot d’aventures imprévues (à méditer si vous êtes fan de Mortadelo y Filemón ou même des westerns classiques).

Contrairement aux lectures trop sérieuses qu’on en fait parfois aujourd’hui, le rire occupe une place centrale dans El Quijote. Jusqu’au XVIIIe siècle, c’était avant tout un livre comique ! Mais sa richesse réside justement dans sa capacité à osciller entre légèreté et profondeur.

L’expérience du lecteur : acte de souveraineté intime

Lire El Quijote – surtout loin des écrans – reste un acte profondément personnel et libre. On n’est soumis ni aux algorithmes ni aux tendances éphémères : juste soi-même face à l’imagination débridée d’un auteur du Siècle d’Or.

Comme le souligne Antonio Muñoz Molina, la lecture n’est pas un refuge pour fuir la réalité, mais un espace où l’on peut respirer face au tumulte ambiant (et Dieu sait que ces dernières années n’en manquent pas). En 2025, alors que tout passe par les réseaux sociaux ou les plateformes numériques, ouvrir un vieux volume papier devient presque subversif.

Pour ceux qui cherchent une pause consciente loin des flux numériques : prenez El Quijote sur une terrasse cordouane au coucher du soleil — je vous garantis que votre regard sur le monde changera subtilement.

Des femmes libres… malgré les contradictions ?

Parlons-en sans tabou : Cervantès vivait à une époque où la place des femmes était très codifiée. Pourtant il imagine Marcela, cette bergère fière qui proclame vouloir vivre libre hors mariage et hors couvent ! Faut-il pour autant faire de Cervantès un précurseur féministe ? Pas si vite… Il exprime souvent les idées conservatrices typiques de son temps ; mais il offre aussi des fenêtres inattendues vers l’autonomie féminine.

C’est là toute la complexité du roman : accepter ses paradoxes plutôt que chercher à coller des étiquettes modernes sur une œuvre ancienne. En cela, relire El Quijote aujourd’hui invite surtout à nuancer nos jugements — une leçon toujours précieuse en Andalousie où le passé dialogue sans cesse avec le présent.

Entre fiction et réel : influences croisées en Europe… jusqu’à Cordoue !

El Quijote n’a pas seulement influencé les écrivains espagnols. Charlotte Lennox en Angleterre s’en inspire pour créer “The Female Quixote”, Jane Austen y trouvera elle-même matière à réflexion sur le roman sentimental… Quant à Dickens ou même certains auteurs français (je pense souvent à Flaubert ou Stendhal), ils puisent dans cette liberté narrative et cette ironie mordante typiquement cervantines.

À Cordoue, nombre de festivals littéraires accueillent régulièrement des débats passionnés sur ces héritages croisés (Festival Cosmopoética notamment). C’est fascinant d’observer comment le récit chevaleresque continue d’alimenter discussions et créations artistiques actuelles sous notre soleil andalou !

Lire comme on explore sa propre ville : conseils pratiques d’une cordouane passionnée

  • Commencez par feuilleter quelques chapitres au hasard plutôt que suivre absolument l’ordre linéaire : laissez-vous porter par votre curiosité !
  • Rejoignez une lecture partagée (il y a souvent des clubs dans nos bibliothèques municipales ou chez Casa Árabe) pour échanger vos impressions autour d’un café frappé sous les orangers.
  • Reliez les épisodes rencontrés dans El Quijote aux lieux réels : baladez-vous près du Guadalquivir après avoir lu les passages champêtres ou perdez-vous dans les patios fleuris pour ressentir l’esprit facétieux de Sancho Panza !
  • N’hésitez pas à consulter différentes traductions ou adaptations jeunesse si vous débutez — ce n’est pas tricher ! Le plaisir prime sur toute orthodoxie littéraire…
  • Enfin : relisez-le plusieurs fois au fil des âges — car « un classique ne finit jamais de dire ce qu’il a à dire » (Calvino avait raison).

Questions fréquentes

Pourquoi lire (ou relire) El Quijote aujourd’hui à Cordoue ?

Parce qu’ici plus qu’ailleurs en Espagne, certaines expressions populaires et traditions rurales font directement écho au roman. Relire ce texte permet donc aussi de mieux comprendre notre identité locale tout en prenant du recul face à la modernité numérique.

Le style ancien est-il difficile d’accès pour les lecteurs français ?

Pas forcément ! De nombreuses traductions récentes rendent le texte fluide et vivant. Et même en version originale espagnole, beaucoup trouvent charme et musicalité dès les premiers chapitres grâce aux situations cocasses universelles.

Existe-t-il des liens concrets entre Cordoue et Cervantès ?

Bien sûr : Cervantès mentionne plusieurs fois l’Andalousie dans son œuvre — dont notre ville — et a longtemps circulé dans toute la région lors de ses pérégrinations administratives. Plusieurs monuments commémorent aujourd’hui son passage autour de la Plaza del Potro.

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