La Salida : quand le flamenco devient confession intime et révolution artistique

a large building with a bunch of windows in it

Découvre comment "La Salida" transcende le flamenco pour devenir un pont entre cultures, émotions et identité profonde. Une sortie hors du commun !

Quand la scène devient confession : ma catharsis par le flamenco

Je n’ai jamais considéré le flamenco comme une simple technique ou un spectacle de virtuosité. Pour moi, c’est un exutoire – une nécessité vitale qui me pousse à déposer au sol tout ce que je porte en moi. Créer « La Salida » fut comme ouvrir mon âme au public : pas de masques ni de posture, juste l’homme derrière l’artiste. Cette démarche m’a demandé un courage nouveau après presque quarante ans d’expérience sur scène.

Ce projet est né d’un besoin viscéral de raconter qui je suis, sans filtre. Il a grandi au contact d’artistes venus d’Arménie, de Catalogne, d’Espagne, de France… Ensemble, nous avons créé dans toutes nos langues, avec tous nos héritages. Le choix du multilinguisme n’était pas esthétique mais organique : chaque langue porte son lot d’émotions et colore la danse différemment.

"Partager sa propre vérité demande bien plus que la maîtrise technique ; cela réclame une vulnérabilité totale."

Dans « La Salida », j’ai exploré mes racines cordouanes tout en invitant l’ailleurs à dialoguer avec elles. Le flamenco y devient alors passerelle — pas seulement vers le public, mais aussi entre des identités parfois contradictoires.

L’ouverture sur le monde : porter la diversité sur les grandes scènes

Présenter « La Salida » au Festival d’Avignon reste une étape bouleversante dans mon parcours. Ce festival est bien plus qu’une vitrine : c’est un véritable carrefour culturel où se croisent sensibilités du monde entier. L’idée même de confronter mon travail à un public aussi hétérogène m’a obligé à repenser la portée universelle de notre création.

Si tu as déjà assisté à Avignon, tu comprendras combien l’énergie collective y est rare et précieuse. Les échanges avec des spectateurs issus de multiples horizons m’ont appris que la singularité locale — mes souvenirs andalous ou mon attachement à Córdoba — peut devenir langage universel quand elle est vécue avec sincérité.

C’est aussi là que je me suis rappelé cette vérité trop souvent oubliée dans les discours officiels sur la "diversité" : rien ne vaut la réalité partagée en direct pour casser les clichés et tisser des liens véritables.

Pour en savoir plus sur le Festival d’Avignon

Du plateau à l’écran : traduire la danse pour le cinéma contemporain

Le passage à la chorégraphie cinématographique a été une aventure fascinante et inattendue. La caméra modifie radicalement notre rapport au corps – elle impose une proximité inédite et une narration différente du spectacle vivant.

J’ai eu le privilège de travailler récemment sur un film où chaque mouvement s’enracinait dans une recherche historique précise : archives andalouses, école bolera du XVIIIe siècle… Ce travail de fourmi m’a permis de mêler héritage et invention en créant des gestes qui racontent autant qu’ils séduisent visuellement.

Collaborer avec des actrices comme Georgina Amorós donne une intensité unique aux séquences : il faut adapter sa sensibilité à leur univers tout en gardant intacte la charge émotionnelle propre au flamenco. Le cinéma oblige à ralentir, détailler chaque intention – un exercice vertigineux quand on vient d’un art où tout jaillit dans l’instant.

Mode & scène : l’élégance en mouvement comme signature créative

Ceux qui me connaissent savent ma passion ancienne pour l’élégance architecturale du vêtement espagnol. Quand j’observe les créations de haute couture aujourd’hui – notamment chez certains designers parisiens ou andalous –, je retrouve cette obsession commune du mouvement et de la géométrie vivante.

Travailler sur « La Ruta de la Elegancia » a été l’occasion rêvée de fusionner tradition cordouane (le célèbre chapeau inclus !) et influences internationales sous forme scénique. J’y ai dirigé une troupe intégralement cordouane — José Rabasco, Maribel Ortíz… — afin que notre enracinement local rayonne jusqu’à Paris.

Présenter notre vision chez l’ambassadeur espagnol dans la capitale française fut un moment suspendu : porter haut les couleurs du sud devant ceux qui façonnent encore aujourd’hui les canons mondiaux du goût reste un immense honneur.

Plongez dans l’histoire du chapeau cordouan

Classique versus vanguardisme : inventer son propre langage chorégraphique

Mon parcours s’inscrit quelque part entre mémoire et rupture permanente – fidèle aux formes anciennes mais toujours prêt à briser leurs codes si cela permet au geste d’éclore autrement. Certains parleront de vanguardisme ; moi j’y vois plutôt une fidélité paradoxale : celle qui consiste à honorer ses maîtres tout en refusant toute fixité.

La vanguardiste n’est pas tant dans l’apparence que dans cet état perpétuel de mouvement intérieur qui pousse sans cesse vers ailleurs.
J’aime puiser chez Goya ou Picasso autant que chez mes anciens professeurs cordouans ; j’invite volontiers amis musiciens arméniens ou catalans à rebattre mes certitudes rythmiques…
En somme, mon seul langage possible demeure celui du mélange assumé — car il est fidèle à ce que je vis vraiment jour après jour.

L’après… ou pourquoi je ne veux rien garder pour moi seul !

À mesure que j’avance dans cette carrière faite de boucles (la scène puis la salle puis la rue…), je comprends combien il est précieux de rester disponible pour ce qui viendra ensuite – les nouveaux projets artistiques bien sûr (comme ma récente carte blanche au Musée Picasso), mais surtout pour celles et ceux qui entrent dans ce chemin avec fraîcheur.
Créer aux côtés d’œuvres majeures du XXe siècle fut inoubliable ; improviser entre sculptures cubistes et toiles monumentales réveille des correspondances secrètes entre danse et peinture… C’est cette gratitude immense envers les lieux, les collègues et surtout envers le public qui guide toutes mes prochaines envies créatives.
Tout partager n’est pas seulement naturel : c’est devenu pour moi une forme d’éthique artistique essentielle.

Questions fréquentes

Qu’apporte réellement « La Salida » au flamenco contemporain ?

Elle propose une approche profondément personnelle où se mêlent tradition andalouse authentique, ouverture multiculturelle réelle et exploration émotionnelle sincère—bien loin des formats standardisés habituellement proposés.

Pourquoi choisir plusieurs langues dans le spectacle ?

Parce que chaque langue porte son imaginaire propre ; intégrer catalan, arménien ou français permet non seulement d’inclure différents publics mais aussi de nuancer l’expression artistique elle-même.

Y a-t-il une vraie différence entre danser sur scène et chorégraphier pour le cinéma ?

Oui ! Sur scène, tout naît ici-et-maintenant devant les yeux ; face caméra il faut redécouper chaque geste selon des logiques visuelles précises—ce sont deux aventures complémentaires mais radicalement différentes !

Photo by Free Nomad on Unsplash

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