Córdoba et 13 jours 13 nuits : Ce que l’Afghanistan nous murmure sur nos propres héros

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Et si l’opération afghane de "13 jours 13 nuits" révélait des échos inattendus à Córdoba ? Plongez dans une histoire humaine, loin du sensationnel.

Un film d’action ou un miroir pour nos consciences cordouanes ?

Il y a des histoires qui, même à des milliers de kilomètres de la Judería, résonnent étrangement avec les échos de nos ruelles chargées d’histoire. En découvrant le film « 13 jours 13 nuits » au cinéma de Córdoba, j’ai été frappée non seulement par la tension haletante du récit – l’exfiltration de milliers d’Afghans en août 2021 –, mais surtout par la façon dont le film rappelle que derrière chaque image choc se cachent des vies entières.

En Andalousie, où les murs murmurent mille récits d’exil et de renaissance, ce film trouve un terrain fertile. Nous sommes nombreux ici à avoir grandi bercés par des souvenirs familiaux liés à l’exode – depuis la Reconquista jusqu’aux guerres plus récentes. Pourtant, rarement ai-je vu une œuvre aussi subtile refuser le spectaculaire pour se concentrer sur la vulnérabilité et le doute d’un homme ordinaire soudain plongé dans l’extraordinaire.

Mohamed Bida : un héros malgré lui, reflet d’une humilité universelle

Dans la culture andalouse – et particulièrement à Córdoba – le mot « héroïsme » est teinté d’une certaine discrétion. On célèbre peu les faits d’armes spectaculaires ; on préfère saluer l’engagement quotidien et silencieux qui bâtit la cohésion d’un quartier ou la survie d’une tradition. C’est exactement ce que montre Roschdy Zem dans son interprétation du commandant Mohamed Bida : il n’a rien du héros flamboyant hollywoodien.

Le film (signé Martin Bourboulon) met en scène ses hésitations, sa peur, sa fatigue… Autant de sentiments universels qui rappellent ceux éprouvés par tout Cordouan face aux défis du quotidien ou dans les moments charnières de l’histoire locale. Loin du spectaculaire facile, « 13 jours 13 nuits » insiste sur cette humanité partagée.

« La force des images est telle qu’on oublie que derrière elles, il y a des hommes, des femmes, des destins. » – Roschdy Zem

Cette pudeur me touche profondément : elle fait écho à celle qu’on retrouve dans tant de familles cordouanes ayant vécu des départs précipités ou des retours incertains. Ici comme là-bas, le courage ne se clame pas – il se vit.

Quand l’écran dialogue avec notre patrimoine vivant

Pourquoi donc parler d’un film franco-afghan sur un blog consacré à Córdoba ? Parce que je crois fermement que voyager (au cinéma comme dans le réel) élargit notre regard sur nos propres héritages. L’histoire racontée par Mohamed Bida rappelle celle de tant d’anonymes ayant trouvé refuge dans les patios secrets de la ville lors des tourments passés.

À travers le parcours personnel du commandant Bida – dont certains pans intimes ne sont présents que dans le livre « 13 jours 13 nuits » chez Denoël – j’ai perçu une familiarité troublante avec les récits transmis oralement chez nous : ces silences lourds après la guerre civile espagnole ou encore ces regards tournés vers l’avenir après chaque grande crise.

La dimension cinématographique permet aussi une prise de conscience collective : voir ensemble ces images fortes dans une salle obscure cordouane crée un espace pour partager émotions et réflexions. C’est tout le sens du vivre-ensemble local.

L’importance du témoignage : donner voix à ceux restés dans l’ombre

Un aspect marquant évoqué lors du tournage : « Il n’y avait pas de témoins… il faut rappeler des faits qui ont été passés sous silence ». Comme guide et conteuse ici à Córdoba, je ressens très fort cette nécessité de documenter les mémoires effacées ou tues.

Roschdy Zem raconte avoir rencontré Mohamed Bida juste une fois avant le tournage : assez pour saisir l’essentiel sans tomber dans l’imitation stérile. Cela souligne combien chaque témoignage porte en lui mille nuances difficiles à retranscrire mais essentielles pour comprendre les ressorts humains derrière l’événementiel.

Chez nous aussi – pensez aux vieux artisans dont les gestes disparaissent faute d’élèves – il importe que ces petites histoires rejoignent la grande Histoire. Dans ce sens, le site officiel du film propose analyses et coulisses utiles pour prolonger la réflexion au-delà du visionnage.

Échos entre exil afghan et mémoire cordouane : pourquoi ce parallèle importe-t-il ?

Derrière mon clavier et mes souvenirs personnels de conversations au patio San Basilio lors des fêtes populaires ou autour d’un thé partagé avec des réfugiés syriens récemment arrivés à Córdoba en 2023, je ressens combien ces grandes opérations internationales trouvent leur prolongement intime chez nous.

Le cinéma peut-il vraiment changer notre perception ? Oui… s’il réussit comme ici à éviter le piège du spectaculaire gratuit pour embrasser toute la complexité émotionnelle vécue par chacun(e). Cela éclaire aussi notre propre rapport aux migrations contemporaines et met en lumière un tissu social qui s’est construit grâce à mille parcours singuliers.

Quelques pistes pour aller plus loin :

  • Rencontrer ceux qui perpétuent la mémoire locale (artisans retraités, familles ayant connu l’exil)
  • Lire témoignages croisés entre réfugiés récents et Cordouans porteurs d’histoires anciennes
  • Participer à un ciné-débat organisé par une association culturelle locale (cf. Casa Árabe ou Filmoteca Andalucía)
  • Comparer vos impressions après avoir vu « 13 jours 13 nuits » avec celles recueillies auprès de voisins ou amis ayant vécu un déracinement quelconque
  • Explorer comment art et mémoire dialoguent aujourd’hui via expositions temporaires consacrées au dialogue interculturel (patios ouverts pendant Festival Flora inclus !)

Mon conseil personnel : laisser parler vos émotions… puis questionner leur origine !

Après avoir quitté la salle obscure cet été-là à Córdoba — cette ville où tant d’histoires se croisent — j’ai ressenti une puissante envie de transmettre ce sentiment d’humilité face aux grands destins anonymes qui façonnent notre monde. Pour moi, c’est cela être voyageur(euse) : reconnaître partout ce fil invisible reliant toutes les mémoires blessées mais vivantes.

Ne ratez pas cette occasion rare : laissez-vous happer par "13 jours 13 nuits", puis revenez flâner dans nos ruelles avec un regard renouvelé — vous y verrez peut-être surgir bien plus qu’un simple souvenir exotique…

Plus d’informations officielles sur "13 jours 13 nuits"
Découvrir les débats autour du patrimoine vivant andalou

Le coin des questions

Le film "13 jours 13 nuits" est-il accessible en version originale sous-titrée ?

Oui, plusieurs cinémas cordouans projettent régulièrement les versions originales sous-titrées en français ou espagnol — renseignez-vous auprès de votre salle favorite !

Quels liens existent entre exil afghan et histoire cordouane ?

L’exil n’a pas de frontières : nombre de familles cordouanes portent encore en elles traces et récits transmis génération après génération. Voir ce film permet souvent un dialogue fécond entre passé local et actualités mondiales.

Où trouver des débats post-projection autour du thème ?

Des associations comme Casa Árabe ou Filmoteca Andalucía organisent fréquemment rencontres-débats après projection pour échanger impressions et regards croisés sur les sujets sensibles abordés au cinéma.

Photo by Koshu Kunii on Unsplash

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