Álvaro Pombo : ma révélation fragilité

Álvaro Pombo, en la Universidad de Alcalá de Henares donde ha recibido el premio Cervantes. / / EFE

Mon ami, il faut lire Álvaro Pombo ! Son discours au Prix Cervantes sur la fragilité m'a bouleversé. Un regard unique sur l'âme humaine. À découvrir absolument !

Mon premier contact avec Álvaro Pombo

Depuis que j’ai posé mes valises ici, dans la magnifique et parfois déroutante Andalousie, j’ai appris à regarder la culture espagnole avec un œil neuf, celui de l’observateur passionné, un peu extérieur mais profondément investi. J’étais à l’affût des voix qui sortent du lot, celles qui ne se contentent pas de raconter, mais qui dissèquent l’âme humaine avec une précision chirurgicale. C’est ainsi que j’ai croisé le chemin d’Álvaro Pombo. Pas dans une librairie poussiéreuse de Cordoue, mais plutôt par le bouche-à-oreille, cette transmission si précieuse qui échappe aux algorithmes. On me parlait d’un esprit vif, ironique, capable de voir la fragilité sous le vernis de l’existence. L’annonce de son Prix Cervantes cette année a évidemment ravivé ma curiosité et celle de mes amis littéraires ici. Quelle consécration pour cet écrivain de Santander, âgé de 85 ans ! Mais au-delà du faste de la cérémonie à Alcalá de Henares, c’est le cœur de son message qui m’a interpellé.

J’attendais un discours académique, peut-être un peu formel, comme souvent lors de ces grandes occasions. Mais Álvaro Pombo, fidèle à lui-même semble-t-il, a choisi une autre voie. Malgré ses problèmes de santé qui l’ont contraint à faire lire son texte par un ami, sa voix, son esprit étaient bien présents. Et quel esprit ! Il a placé la fragilité au centre de sa réflexion, un thème qu’il explore depuis des décennies dans son œuvre. Cela m’a rappelé cette conversation avec un vieux libraire de la Judería, qui me disait que la véritable force de l’art andalou réside justement dans sa capacité à exprimer la vulnérabilité, la douleur, sans jamais céder au désespoir. Une idée qui, je le réalise maintenant, trouve un écho puissant chez Pombo.

La surprenante théorie de la fragilité

Le titre de son discours au Prix Cervantes, « Cervantes, une théorie de la fragilité », est en soi un programme. Connecter la grandeur de Cervantes à la fragilité, c’est audacieux, non ? Álvaro Pombo ne s’arrête pas là. Il voit en Cervantes, l’homme, l’écrivain, un exemple de cette vulnérabilité : pas de prix littéraires, du plagiat (pour la seconde partie de Don Quichotte), même la prison ! Seuls restaient, selon Pombo, « le talent, la grâce et l’humour ». Une sorte de résilience née de l’adversité, peut-être. Il pousse l’idée plus loin en citant Le Bachelier de Salamanque (El licenciado Vidriera), une nouvelle exemplaire de Cervantes où le personnage bascule dans la folie après avoir été empoisonné. N’est-ce pas l’illustration parfaite de la fragilité de l’esprit, même le plus brillant ?

Ce thème de la fragilité n’est pas une faiblesse dans son écriture, loin de là. Pombo affirme qu’une « narrative de la fragilité n’a pas à être une narrative cassable ». Au contraire, elle peut être « aussi inébranlable que le texte de Don Quichotte ». C’est là toute la subtilité de sa pensée. Explorer la vulnérabilité humaine non pas pour apitoyer, mais pour révéler une vérité profonde, une force paradoxale qui réside dans la pleine conscience de nos limites. C’est un miroir tendu à notre époque, obsédée par la performance et l’invulnérabilité. Voir un écrivain de cette stature oser parler de la fragilité, de la sienne et de celle du monde, est un acte d’une rare sincérité. Cela m’a fait repenser à ces patios cordouans, si solides en apparence, mais dont la beauté fragile dépend entièrement du soin constant qu’on leur porte.

Un maître des mots au-delà des genres

Ce qui rend l’œuvre d’Álvaro Pombo si fascinante, c’est aussi son refus de se laisser enfermer dans une case. Poésie, roman, essai… il touche à tout avec une aisance déconcertante. Il a débuté en 1973 avec un recueil de poèmes, Protocolos, et depuis, il n’a cessé d’explorer les possibilités du langage. Il le décrit comme une « arme plastique », capable de s’adapter à chaque nuance de la réalité qu’il observe. C’est peut-être ce qui donne à sa prose cette netteté, cette précision qui m’avait frappé la première fois que j’ai ouvert un de ses livres (si ma mémoire est bonne, c’était Où vont les femmes, un titre déjà évocateur).

Son style, souvent ironique, parfois mordant, est toujours au service d’une indagation profonde de la condition personnelle. Il sonde les sentiments, les contradictions qui nous animent, sans jamais juger, mais avec une immense empathie. Ses personnages ne sont pas des héros invincibles, mais des êtres complexes, traversés par leurs doutes et leurs failles – encore cette fragilité ! Cinquante-deux ans de carrière, c’est immense. C’est le temps d’une vie dédiée à l’écriture, à ciseler chaque phrase pour qu’elle révèle une part de cette vérité cachée. On sent dans ses textes le travail acharné, mais aussi une liberté totale, une joie d’expérimenter. C’est ce mélange de rigueur et de fantaisie qui rend sa lecture si enrichissante.

Le Prix Cervantes : une consécration nécessaire ?

Recevoir le Prix Cervantes, c’est accéder au panthéon de la littérature en langue espagnole. C’est la reconnaissance suprême, le Graal pour tout écrivain hispanophone. Pourtant, l’ironie de Pombo sur Cervantes lui-même, qui n’a reçu aucun prix de son vivant, interroge. Est-ce que la reconnaissance institutionnelle est vraiment nécessaire à la postérité ? L’œuvre de Cervantes a survécu sans elle, portée par sa seule force intrinsèque. Alors, à quoi servent les prix ? Sans doute à mettre en lumière des auteurs exceptionnels, à les faire découvrir à un public plus large. Dans le cas d’Álvaro Pombo, dont l’œuvre est immense et parfois exigeante, c’est une opportunité formidable.

C’est aussi, d’une certaine manière, un acte de l’institution littéraire qui, en récompensant Pombo et sa « théorie de la fragilité », valide l’importance de ce thème dans le paysage culturel contemporain. Cela me rappelle ces discussions passionnées que nous avons ici, en Andalousie, sur la place de la vulnérabilité dans l’art flamenca. Cette capacité à transformer la douleur en beauté, la fragilité en force expressive. Le prix Cervantes, en célébrant Pombo, célèbre aussi peut-être cette idée que la profondeur humaine réside autant dans nos failles que dans nos succès. C’est une belle leçon d’humilité, venue du sommet de la reconnaissance.

FAQ – Vos questions sur Álvaro Pombo

Qui est Álvaro Pombo ?

Álvaro Pombo est un écrivain espagnol né en 1939. Il est l’auteur d’une œuvre vaste et diverse, comprenant de la poésie, des romans et des essais. Il est reconnu pour son style ironique et lucide, et pour son exploration des thèmes de la fragilité humaine et des sentiments contradictoires.

Pourquoi le thème de la fragilité est-il important chez lui ?

Pombo considère la fragilité non pas comme une faiblesse, mais comme une composante essentielle de l’existence humaine et un sujet central de sa littérature. Il y voit une source de vérité et de résilience, et la met en parallèle avec la vie et l’œuvre de Cervantes.

Quels livres lire pour commencer ?

Pour découvrir Álvaro Pombo, vous pourriez commencer par des romans comme Où vont les femmes (Donde van las mujeres), La quadrature du cercle (La cuadratura del círculo) ou Contre nature (Contra natura). Son recueil de poèmes Protocolos marque également ses débuts.

Réflexions finales depuis l’Andalousie

Assister, même de loin, à la remise du Prix Cervantes à Álvaro Pombo et entendre (ou lire) son discours sur la fragilité, a été une expérience marquante. Cela confirme mon sentiment que la littérature espagnole actuelle possède des voix d’une profondeur rare, capables de nous parler de nous-mêmes avec une intelligence et une sensibilité exceptionnelles. Pombo n’est pas un auteur facile, il faut l’aborder avec curiosité et une certaine ouverture, mais la récompense est immense. Il nous invite à regarder nos propres failles non pas avec honte, mais comme une part intégrante et même enrichissante de notre être. Un message particulièrement pertinent dans le monde turbulent qui est le nôtre.

Depuis ma fenêtre ici à Cordoue, je vois les murs épais et séculaires de la Mosquée-Cathédrale, symboles de force et de permanence. Pourtant, je sais que leur histoire est aussi celle de transformations, d’adaptations, de moments de vulnérabilité. La fragilité n’est pas l’opposé de la grandeur, mais peut-être sa compagne silencieuse. Si vous cherchez à comprendre un peu mieux l’âme espagnole, ou simplement l’âme humaine, je ne peux que vous recommander de vous plonger dans l’œuvre d’Álvaro Pombo. C’est un voyage qui vaut le détour.

Pour aller plus loin dans la découverte de la littérature espagnole contemporaine, vous pouvez consulter le site de l’Institut Cervantes, une ressource précieuse. Et pour mieux comprendre le Prix Cervantes, le site du Ministère de la Culture espagnol fournit des informations officielles.

Media: Diario Córdoba – Álvaro Pombo, en la Universidad de Alcalá de Henares donde ha recibido el premio Cervantes. / / EFE

Source: Diario Córdoba – Álvaro Pombo saca fuerzas y recibe el premio Cervantes en persona: "Es posible que para alcanzar la grandeza en España, tengamos que llegar a la pobreza"

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