Partager 0FacebookTwitterPinterestEmail 1 TL;DR🌧️ Une basilique mozárabe oubliée inondée par les pluies au nord de Cordoue🏛️ Un site chrétien du VIIIe siècle qui révèle une autre histoire de l’Andalousie🧭 Aux voyageurs, l’invitation à regarder au‑delà de la Mezquita et des cartes postalesSaviez-vous que Cordoue cache, sous un futur boulevard, une basilique mozárabe unique en péninsule Ibérique ? Les pluies de la borrasca Claudia l’ont inondée et relancé un débat brûlant sur la protection du patrimoine.Saviez-vous qu’aux portes de Cordoue, sous le tracé d’une future voie rapide, dort une basilique chrétienne mozárabe du VIIIe siècle ? Et que les pluies de la borrasca Claudia l’ont récemment transformée en piscine archéologique ? Sous le soleil andalou, on oublie parfois que le patrimoine n’est pas figé : il se découvre, se discute… et parfois se noie sous 40 litres de pluie par mètre carré. L’inondation de ce site en périphérie de Cordoue n’est pas seulement une mauvaise nouvelle locale : elle raconte la fragilité d’une ville palimpseste, où chaque projet urbain heurte des siècles d’histoire enfouis. Sous la pluie, une basilique oubliée refait surface Le terrain en question se trouve au nord de Cordoue, là où doit passer la future Ronda Norte, ce boulevard de ceinture que les habitants attendent – ou redoutent – depuis des années. Lors des fouilles préventives, les archéologues ont mis au jour un ensemble d’époque mozárabe absolument unique en péninsule Ibérique. Au cœur du site, une basilique chrétienne de trois nefs, orientée est-ouest, avec un abside à l’ouest et un possible narthex à l’est, d’environ 20 mètres de long sur 13 de large. De part et d’autre, deux monastères symétriques : au nord, un monastère masculin ; au sud, un féminin, chacun organisé autour d’un cloître portiqué. À l’est, les archéologues ont repéré un baptistère ou une structure hydraulique, complétant le tableau d’un véritable petit complexe monastique aux portes de la Cordoue émirale. La datation situe cet ensemble entre le VIIIe et le IXe siècle, en pleine période émirale, avec un détail troublant : aucun matériau califal n’a été retrouvé. Surtout, les niveaux révèlent qu’il s’agit de la reconstruction mozárabe d’une église plus ancienne, tardoromaine ou wisigothique, en usage aux Ve–VIIe siècles. Vous pourriez être interessé par Investigation de la Guardia Civil sur des puits clandestins à Córdoba 9 novembre 2024 Córdoba obtient 10 nouveaux Soletes Repsol en 2023 11 novembre 2024 Ce chantier raconte aussi un moment clé de l’histoire de Cordoue : la décision de ‘Abd al-Rahman Ier, vers 784–785, d’autoriser les chrétiens à rebâtir des églises dans la périphérie de la Médina, en échange de la cession de la moitié de la basilique de San Vicente, future Mezquita Aljama. Ici, on voit concrètement ce compromis politique et religieux, coulé dans le mortier de chaux et la terre battue. Quand la borrasca Claudia met le patrimoine à nu Fin octobre, la météo a décidé de tester la solidité de ce fragile équilibre. Après un premier épisode de fortes pluies le 29 octobre, le site – alors encore à ciel ouvert – s’est retrouvé inondé. Le lendemain seulement, on installe un géotextile pour le protéger. Trop tard, diront certains. Pourtant, une résolution de la Délégation de Culture et Patrimoine, datée du 3 octobre, demandait déjà au promoteur des travaux de se charger d’une protection efficace. Les techniciens avaient été clairs : le site est composé de pavements en mortier de chaux ; les murs sont en tapial (terre banchée), enduits et blanchis ; l’ensemble est extrêmement fragile face à la pluie et aux variations d’humidité. Début novembre, la borrasca Claudia s’invite à Cordoue. En deux jours, près de 40 litres par mètre carré s’abattent sur la ville. Le géotextile posé sur le site se retrouve débordé. Résultat : les vestiges de la basilique et des monastères sont de nouveau noyés sous l’eau, comme en témoignent les vidéos publiées par la presse locale. Ce vendredi-là, deux groupes politiques municipaux – PSOE et Hacemos Córdoba – annoncent une plainte auprès du parquet contre les consejerías régionales de Fomento et de Cultura, pour un supposé délit contre le patrimoine lié au manque de protection des vestiges. « À Cordoue, la bataille se joue autant dans les bureaux que dans la terre humide des fouilles. » En passant récemment près de ce secteur en travaux, j’ai retrouvé cette sensation familière : voir cohabiter les engins de chantier, les bâches de geotextile, et juste en dessous, des siècles d’histoire qui ne demandent qu’à respirer. Trois Cordoue qui se superposent Cette inondation parle au-delà du simple incident technique. Elle met en lumière trois Cordoue qui se superposent. Il y a d’abord la Cordoue carte postale, celle que les voyageurs connaissent : la Mezquita-Cathédrale, les patios de San Basilio, l’Alcázar des Rois Chrétiens, les ruelles blanches de la Judería. Une ville parfaitement cadrée dans les photos Instagram. Ensuite, il y a la Cordoue souterraine, celle que révèlent les fouilles : le complexe mozárabe de la Ronda Norte, le site palatial de Medina Azahara (classé au patrimoine mondial de l’UNESCO), ou encore les vestiges tardo-romains de Cercadilla près de la gare. Une Cordoue faite de couches, de reconstructions, de négociations religieuses et politiques comme celle entre les chrétiens et ‘Abd al-Rahman Ier. Enfin, il y a la Cordoue contemporaine, avec ses besoins concrets : routes, logements, infrastructures. La future Ronda Norte n’est pas un caprice, mais un enjeu de mobilité pour des milliers d’habitants. L’inondation de la basilique mozárabe est précisément à l’intersection de ces trois réalités : elle pose la question de ce que nous choisissons de préserver, de comment nous le faisons, et de la place que nous laissons à ces lieux qui n’entreront jamais dans un top 10 touristique… mais qui donnent du sens à tout le reste. Comment, en tant que voyageur, se relier à cette Cordoue invisible ? On pourrait se dire : « De toute façon, ce site n’est pas visitable, que puis-je y faire ? » En réalité, cet épisode est une invitation à ajuster notre regard lorsque nous venons visiter Cordoue. Quelques pistes très concrètes : Visiter le Musée archéologique de Cordoue, installé dans un palais Renaissance, qui permet de comprendre la stratification de la ville, des Romains aux périodes islamiques et chrétiennes. Prendre le temps, dans la Mezquita, de lire les panneaux sur la basilique de San Vicente qui l’a précédée, et de repérer les éléments visigothiques réutilisés. Découvrir Medina Azahara, la ville palatine du Xe siècle, pour saisir la puissance du califat… et imaginer, en contrepoint, la modestie d’une communauté chrétienne mozárabe vivant en marge. À la gare, faire un détour par Cercadilla, site tardo-romain souvent ignoré, mais fascinant pour comprendre le rôle de Cordoue dans l’Empire. En flânant ainsi, on commence à percevoir cette trame cachée : des communautés chrétiennes vivant sous domination musulmane, adaptant leurs églises, leurs monastères, négociant leur place dans une Andalousie en pleine transformation. Préserver pour transmettre : notre rôle dans l’histoire Les images de la basilique mozárabe inondée ont choqué ici, à Cordoue. Elles ont aussi réveillé une fierté : celle de vivre dans une ville où l’on peut encore découvrir, par hasard, une basilique chrétienne du VIIIe siècle sous un terrain vague. Comme voyageur, on ne décide pas des protections légales, ni des géotextiles posés à temps ou trop tard. En revanche, on peut encourager une autre manière de faire du tourisme : en posant des questions, en s’intéressant à ces sites « invisibles », en soutenant les musées, en préférant une visite guidée qui parle aussi des couches cachées de la ville. Je me surprends souvent, en guidant des amis français, à lever la main vers un terrain en friche ou un immeuble banal en disant : « Là-dessous, il y a sûrement quelque chose ». Ce n’est pas de la poésie : à Cordoue, c’est presque une certitude. Au fond, cette basilique mozárabe noyée par la borrasca Claudia nous rappelle une chose simple : Cordoue se vit aussi dans ce que l’on ne voit pas encore. Et si votre prochaine escapade ici était l’occasion de regarder, un peu plus, sous la surface ? 📸 Et vous, en préparant votre voyage, est-ce que vous aimez explorer ces couches méconnues des villes ? Partagez vos questions et vos coups de cœur en commentaires ou sur Instagram avec #EscapadeaCordoue. Questions fréquentes Qu’est-ce qu’un site mozárabe ? On appelle mozárabes les chrétiens qui vivaient en al-Andalus sous domination musulmane, en conservant leur religion mais en adoptant souvent la langue et certains usages arabes. Un site mozárabe est donc un lieu (église, monastère, quartier) lié à ces communautés, généralement entre les VIIIe et XIe siècles. Ces vestiges sont précieux car ils témoignent d’une coexistence complexe entre cultures chrétienne et islamique. Peut-on visiter aujourd’hui la basilique mozárabe découverte près de la Ronda Norte ? À ce stade, il s’agit d’un chantier archéologique lié à un projet routier, et non d’un site touristique ouvert au public. L’accès est limité aux équipes techniques pour des raisons de sécurité et de conservation. Pour suivre l’actualité du site, le mieux est de consulter la presse locale et les informations de l’Office du Tourisme de Cordoue, qui relayent l’évolution du dossier. Quels lieux visiter à Cordoue pour mieux comprendre l’époque chrétienne et mozárabe ? Pour saisir cette période, commencez par la Mezquita-Cathédrale, où l’on peut lire en filigrane le passage de la basilique de San Vicente à la grande mosquée puis à la cathédrale. Le Musée archéologique offre un panorama complet de l’histoire de la ville, y compris les niveaux tardo-romains et wisigothiques. L’Alcázar des Rois Chrétiens et certaines églises fernandines permettent enfin de comprendre comment le pouvoir chrétien a reconfiguré l’espace après la Reconquête, tout en héritant d’un paysage déjà marqué par des siècles de coexistence. archéologieInondationPatrimoine Partager 0 FacebookTwitterPinterestEmail María Fernanda González María est notre journaliste voyage basée à Cordoue. En tant que Cordouane et exploratrice du monde, elle possède un talent particulier pour connecter les voyageurs francophones à l'essence de sa ville. Sur Escapade à Cordoue, María partage ses découvertes, ses conseils d'experte locale et ses récits qui donnent vie au patrimoine et à la culture vibrante de Cordoue et de l'Andalousie. Elle explore aussi bien les ruelles historiques de la Judería que les métropoles lointaines, toujours en quête d'histoires qui relient les gens et les lieux. Ses contributions sont une invitation à voir Cordoue à travers les yeux d'une passionnée, offrant des clés pour un voyage enrichissant en Andalousie. entrée prédédente Los Caños à Cordoue : quand la pluie reporte le concert et change votre soirée en Andalousie A lire aussi Los Caños à Cordoue : quand la pluie... 14 novembre 2025 Cordoue côté coulisses: comment les subventions culturelles influencent... 6 novembre 2025 Mezquita de Cordoue: la renaissance de la Puerta... 29 octobre 2025 Et si Cordoue cachait une basilique oubliée ?... 28 octobre 2025 Tu ne l’avais jamais remarqué… Le pont Mocarra... 19 octobre 2025 Le dessous de la route : vestiges, craintes... 17 octobre 2025 Vu de l’intérieur : l’annulation de Medina Azahara... 10 octobre 2025 Le détail oublié qui change tout : de... 20 septembre 2025 Tu ne l’avais jamais remarqué… Bad Bunny évite... 11 septembre 2025 Cordoue, des califes aux copyrights: ce que personne... 10 septembre 2025