Rockeur sous la pluie, poète à vif : comment Bunbury renoue avec l’esprit Cántico depuis Córdoba

Carnet de poèmes ouvert près d’une fenêtre pluvieuse, guitare à côté, lumière douce et intime.

TL;DR

  • 🌧️ Bunbury transforme le deuil en poésie qui apaise
  • 🎸 Entre riffs et vers libres, la musique infuse chaque poème
  • 📚 Córdoba et l’héritage Cántico donnent une profondeur rare

Bunbury signe un recueil plus intime que jamais, et oui, à Córdoba. Tu veux comprendre comment un rockeur transforme la maladie, le deuil et la mémoire en poésie lumineuse — sans renier le riff ? J’y étais : voici ce que ce livre change, concrètement.

Poésie de Bunbury, deuil et pluie : pourquoi c’est majeur

Est-ce que tu savais que l’un des rockeurs les plus influents en espagnol écrit ses meilleurs vers quand il parle bas ? Dans « Los suaves deslices de la lluvia », Enrique Bunbury met la voix au ralenti pour laisser passer l’orage intérieur. Le livre sonde la maladie, la perte du père, la fragilité des corps — et renouvelle un classicisme discret par un vers libre qui respire. On entend littéralement la « musique silencieuse » que salue Luis Alberto de Cuenca dans son prologue : pas de métrique rigide, mais une tradition qui affleure, comme la guitare qui sonne encore quand la main s’arrête.

Ce recueil touche parce qu’il assume la pudeur. Il cherche la beauté là où on ne la convoque pas d’ordinaire : dans les couloirs d’hôpital, dans une bruine obstinée, dans l’étrange lucidité des adieux. Bunbury, le chanteur qui a gagné un Latin Grammy en 2017, se montre ici fils, ami, témoin — pas star. C’est précisément pour cela que ces poèmes restent : ils refusent la pose, ils misent sur l’aveu juste. Dans la section suivante, on comprend pourquoi Córdoba est le meilleur terreau pour une telle confidence.

À Córdoba, l’ombre de Cántico veille encore

À Córdoba, le mot « Cántico » n’est pas qu’un logo d’éditeur : c’est une lignée. On pense au groupe poétique mené par Pablo García Baena, la sensualité de la langue, l’élégance sans emphase. Publier ici n’est jamais anodin. Bunbury y avait déjà ancré « MicroDosis » ; il revient avec un livre plus dépouillé, comme s’il faisait confiance à la ville pour garder le secret. Je l’ai ressenti un soir de pluie, sous les arcades de la Corredera : cette lumière plate qui efface le superflu et met à nu les volumes, les façades, les gens — la poésie de Córdoba est géométrique et charnelle à la fois.

Ce qui frappe, c’est la manière dont le recueil réactive un certain classicisme andalou : précision de l’image, parfum de mélancolie, mais jamais de pathos. On retrouve des échos de Joan Margarit et de Luis García Montero (chacun prête un vers en exergue de partie), preuve que cette pluie-là est une passerelle entre voix espagnoles d’hier et d’aujourd’hui. C’est pour cela que la parution chez un éditeur cordouan n’est pas une coquetterie locale, mais un geste esthétique et mémoriel. Et dans la section suivante, on verra comment la musique infuse ces pages.

Ce que la musique change dans ses vers

Bunbury écrit comme on mixe : il joue sur les couches, les silences, les retours de motifs. La rythmique est subtile, mais omniprésente. Dans « Un western », une curiosité « de celui à qui rien n’est étranger » ouvre le champ : la voix est cinématographique, travelling lent, horizon de poussière. Puis l’oreille reconnaît un gimmick : objets récurrents (la guitare, l’hôtel, la pluie) traités comme des leitmotivs. On pense à Leonard Cohen ou Patti Smith, non pour copier leur geste, mais parce que c’est le même pari : que la chanson et le poème se répondent sans se confondre.

Ce croisement rock/poésie, Luis Alberto de Cuenca le nomme bien : une « musique callada », un groove intérieur. Il faut lire ces textes à voix mi-haute pour sentir le tempo, les syncopes, la tension du vers libre qui retombe juste. Comme en studio, la production est invisible, mais millimétrée. C’est ce qui rend le livre accessible sans être simple : tu peux entrer par l’image, rester pour le rythme, et repartir avec une phrase tatouée en mémoire. Dans la section suivante, je te guide vers trois poèmes décisifs pour prendre le pouls du livre.

Les 3 poèmes à lire en premier

  1. El hotel de las mil y una estrellas — Un motel mental où veiller devient un rituel. Le banal se charge de métaphysique : néons, couvertures rêches, et ce ciel qui clignote au plafond. Tu sors de là avec une nouvelle idée de l’attente.
  2. La guitarra — Elle n’est pas un accessoire : c’est un personnage. L’instrument devient mémoire tactile, cicatrice qui sonne. Le texte interroge ce que l’on transmet quand on dit « joue » et quand on se tait.
  3. El crematorio — Le plus risqué : nommer l’indicible. Bunbury pose les mots comme on pose des fleurs, sans emphase. Le poème est un geste : accompagner, regarder en face, tenir droit le dernier adieu.
  • Astuce de lecture: lis ces trois textes à des moments différents de la journée. Le matin pour « La guitarra » (la main est fraîche), la nuit pour « El hotel… » (les lumières parlent), et l’après-midi calme pour « El crematorio » (pour respirer). Prochaine étape: ancrer cette lecture dans la ville qui l’a vue naître.

Lire Bunbury à Córdoba : lieux, moments, rituels

Pour sentir le livre, choisis des lieux qui laissent passer la rumeur. Un café discret près d’un patio, le murmure d’une fontaine, la pluie qui passe et repasse sur la pierre : voilà le tempo. J’emporte toujours un crayon ordinaire — pas de stylo-feutre — pour souligner deux ou trois images et griffonner des échos personnels : un parfum de jasmin, un souvenir de voix paternelle, une note de guitare qui revient de loin.

  • Choisis un siège face à une fenêtre : la pluie est un personnage.
  • Lis par fragments, sans binge-reading. Ce n’est pas une série, c’est un album.
  • Entre deux poèmes, ferme le livre une minute. Laisse la réverbération faire son œuvre.

Tu verras comme la ville répond : les dalles luisent après l’averse, les façades se taisent mieux, la Mezquita semble respirer plus lentement. Dans la section suivante, tu découvriras la constellation littéraire que ce recueil active — de Cohen à García Montero — pour mieux situer Bunbury dans la carte.

Un pont avec Cohen, Margarit et García Montero

Comparer Bunbury à Leonard Cohen, c’est tentant mais loqueteux si on s’arrête au chapeau et à la voix grave. La vraie passerelle, c’est l’éthique du vers : précision, dépouillement, fidélité au vécu. Joan Margarit, ingénieur-poète, a prouvé qu’on peut parler de la mort avec une clarté presque architecturale ; Luis García Montero a fait de l’intime un territoire civique. Bunbury s’inscrit dans cette ligne en ajoutant la tension du rockeur : il sait ménager la montée, il coupe au bon endroit, il accepte le silence.

Le prologue de Luis Alberto de Cuenca insiste sur l’équilibre entre tradition et liberté : pas de métrique imposée, mais une oreille restée classique. C’est crucial pour comprendre pourquoi ces poèmes tiennent la route à la première, puis gagnent à la relecture. Et si tu veux prolonger, son parcours de poète s’est affirmé avec « Exilio Topanga » (2021), « MicroDosis » (2023), « La Carta » (2024) et, côté musique, « Cuentas pendientes » (2025). Pour le contexte éditorial et des détails de structure (les trois parties, les exergues), tu peux jeter un œil au papier de référence publié par Cordópolis, selon cet article de Cordópolis.

Où se le procurer et comment bien l’aborder

Le livre paraît chez un éditeur cordouan qui revendique un artisanat soigné : format lisible, sobriété graphique, et ce papier qui ne trahit pas le crayon. Côté disponibilité, vise d’abord les librairies indépendantes du centre historique et les plateformes de l’éditeur. Les premières réceptions sont souvent plus riches en échanges : on y croise des lecteurs de Bunbury côté rock et côté poésie, et la conversation vaut autant que l’achat.

  • Feuille d’itinéraire: prends l’habitude de noter une image par poème — pas une phrase entière, une image.
  • Fais la paix avec la lenteur: un poème, un café, un peu de pluie.
  • Reviens-y après une semaine: certains vers s’ouvrent avec retard.

Tu verras : ce n’est pas un livre qui « impressionne », c’est un livre qui « s’installe ». Et quand il repart, il laisse une musique discrète, exactement ce qu’il promet.

Questions Fréquentes

Où acheter « Los suaves deslices de la lluvia » à Córdoba ?

Tu peux le trouver dans les librairies indépendantes du centre historique et via le catalogue en ligne de l’éditeur. N’hésite pas à demander une commande si le stock est parti : les réassorts arrivent vite.

Faut-il connaître Héroes del Silencio pour apprécier le recueil ?

Pas du tout. Les poèmes se tiennent seuls. Si tu aimes sa musique, tu reconnaîtras un sens du rythme et des images, mais l’entrée est possible par la poésie pure.

Le livre est-il sombre ou consolant ?

Les deux. Il parle de maladie, de deuil et de fin — sans détour — mais cherche constamment la beauté, la tendresse et la lumière calme. C’est une lecture exigeante, jamais plombante.

En quoi la maison d’édition cordouane change-t-elle la donne ?

Publier ici, c’est dialoguer avec un héritage (Cántico) et une ville qui sait écouter la nuance. L’éditeur valorise le texte sans effets, ce qui colle au ton intime du recueil.

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