Puerto Rico et l’Espagne : un vieux rêve d’union encore vivant ?

an aerial view of a village in the mountains

Et si Puerto Rico redevenait espagnole ? Découvrez ce mouvement inattendu, son histoire et ses enjeux identitaires fascinants.

Quand l’histoire refait surface : le rêve espagnol de Puerto Rico

Je dois avouer que ce sujet m’a toujours intriguée. Depuis Cordoue — terre andalouse imprégnée par des siècles d’échanges et d’identités croisées — j’observe avec curiosité cette actualité venue du grand large : un mouvement à Puerto Rico souhaite… rejoindre l’Espagne comme 18e communauté autonome ! Insolite ? Oui, mais pas tant que ça si l’on regarde l’Histoire en face.

Puerto Rico fut espagnole durant plus de quatre siècles. Ce n’est qu’en 1898, lors de la guerre hispano-américaine, que l’île fut cédée aux États-Unis. Depuis lors, elle navigue dans une zone grise institutionnelle : ni État américain à part entière, ni nation indépendante. Résultat : une partie de la population regarde en arrière… ou plutôt vers l’Est.

Adelante Reunificacionistas : qui sont-ils vraiment ?

Vous ne trouverez guère d’informations sur ce mouvement dans les médias traditionnels — eux-mêmes parlent de « blackout » médiatique. Leur nom : Adelante Reunificacionistas. Leur proposition est simple en apparence (mais ô combien complexe dans les faits) : que Porto Rico devienne une communauté autonome espagnole comme l’Andalousie ou la Catalogne.

Mais attention : il ne s’agit pas ici d’un parti politique officiel mais d’une association culturelle — la législation américaine interdisant tout groupe prônant ouvertement des changements incompatibles avec le fédéralisme US. Cela explique aussi leur visibilité limitée.

Côté soutien populaire ? Les leaders du mouvement évoquent 16 % de sympathisants sur l’île… un chiffre impossible à vérifier par des enquêtes indépendantes à ce jour.

Entre nostalgie et utopie : un désir minoritaire mais tenace

Ce phénomène n’est pas isolé. Il s’inscrit dans une constellation de mouvements européens (Valonia rêvant de France, Tyrol du Sud lorgnant sur l’Autriche…). Le point commun ? Partout, on retrouve des communautés qui ne cherchent pas à se séparer mais… à se réunir avec une patrie "perdue".

Dans le cas porto-ricain cependant, le contexte est unique : après plus d’un siècle sous bannière étoilée américaine, pourquoi certains rêvent-ils toujours de Madrid ? La réponse touche à l’intime : langue maternelle (l’espagnol reste dominant), culture catholique profonde et sentiment d’appartenance à la sphère hispanique européenne plutôt qu’anglo-saxonne nord-américaine.

Mais soyons honnêtes : sans mécanismes juridiques pour intégrer Porto Rico côté espagnol (la Constitution ibérique ne prévoit rien pour accueillir un territoire extra-européen), ni possibilité réaliste côté américain (le Congrès devrait autoriser toute séparation — hautement improbable), cette option demeure pour l’instant symbolique.

Au-delà du droit : identité et représentation au XXIe siècle

On ne peut comprendre ce regain sans examiner la réalité quotidienne porto-ricaine. Statut ambigu oblige : les habitants sont citoyens américains… sans représentation pleine au Congrès ; ils ne votent pas pour le président US ; ils jonglent entre subventions fédérales et autonomie limitée ; leurs référendums répétés n’ont jamais abouti à une solution définitive — État américain ou indépendance totale. Un vrai casse-tête identitaire !

Là où beaucoup voient une île tournée vers Washington ou Miami, certains Porto-Ricains affirment haut et fort leur hispanité. À Cordoue comme ailleurs en Andalousie, ce débat fait écho aux questions que nous nous posons sur nos propres racines et frontières mouvantes au fil des siècles.

Pourquoi cette idée fascine-t-elle autant ?

Pour moi, le cœur du sujet va bien au-delà du juridique ou du politique. C’est la force de la mémoire collective qui frappe ici. Après tout, combien de jeunes Andalouses rencontrées lors de mes voyages m’ont confié voir en Porto Rico non seulement une « île caribéenne », mais aussi un miroir vibrant de notre propre histoire coloniale ?

C’est aussi le témoignage que même aujourd’hui — alors qu’on parle tant d’individualisme ou de fragmentation nationale — certains groupes rêvent encore d’appartenir à quelque chose de plus vaste. L’identité se construit autant par les liens perdus que par ceux créés ; elle évolue constamment au gré des échanges migratoires et culturels (dossier approfondi ici).

L’Espagne vue depuis San Juan : fascination réciproque ?

Du côté espagnol cependant… peu d’échos officiels ! Je me souviens avoir interrogé des amis historiens à Séville : leur réaction oscille entre amusement cordial (« c’est romantique ! ») et scepticisme réaliste (« aucun gouvernement n’y songera sérieusement »). Pour la plupart des Espagnols, Porto Rico demeure avant tout un passé partagé ; les liens actuels sont surtout linguistiques ou touristiques (voir également).

Il faut dire qu’au quotidien — dans ma propre famille andalouse comme chez mes voisins cordouans — les débats sur les autonomies régionales restent déjà suffisamment animés pour laisser peu de place à ce genre d’hypothèse !

Comparaisons européennes : unité contre fragmentation ?

Ce cas porto-ricain révèle un paradoxe passionnant : alors que certains peuples réclament la partition ou l’autonomie accrue (Écosse, Catalogne…), ailleurs on rêve encore d’anciens regroupements supranationaux (Grande Roumanie…). Les cartes politiques européennes restent bel et bien mouvantes en 2025 ; chaque territoire cherche sa place selon sa propre lecture historique.

Puerto Rico sert ici d’exemple emblématique pour repenser nos conceptions figées des appartenances nationales. Et je crois profondément que voyager — physiquement ou par la pensée — aide justement à dépasser ces visions simplistes.

Ce qu’il faut retenir avant tout voyageur curieux…

  • Ce mouvement reste ultra-minoritaire et largement symbolique.
  • Il ouvre pourtant une fenêtre inédite sur la question identitaire caraïbe/européenne.
  • La mémoire coloniale façonne encore beaucoup notre présent collectif – aussi bien là-bas qu’ici en Andalousie !
  • Il existe peu voire pas de chances concrètes qu’une telle réunification ait lieu sous sa forme actuelle.
  • Mais ces débats enrichissent notre regard sur les dynamiques postcoloniales modernes.

Comme toujours lorsque je parcours les ruelles séculaires de Cordoue puis écoute des récits venus du bout du monde… je me dis qu’il y a mille façons différentes « d’appartenir ». Et cela mérite qu’on s’y attarde avec curiosité et nuance.

Questions fréquentes

Pourquoi certains Porto-Ricains veulent-ils redevenir Espagnols ?

C’est avant tout lié au sentiment culturel hispanique très fort sur l’île (langue maternelle espagnole majoritaire), associé à une identité nationale incertaine sous tutelle américaine depuis plus d’un siècle.

Est-ce juridiquement possible aujourd’hui ?

Non, ni le droit américain ni le droit espagnol ne permettent actuellement une telle réunification territoriale ; il faudrait modifier profondément les deux systèmes constitutionnels.

Quel impact ce débat a-t-il réellement sur la société porto-ricaine ?

Le mouvement reste très minoritaire mais sert de révélateur puissant quant aux enjeux identitaires contemporains et au rapport complexe entre colonialisme passé et présent vécu.

Photo by Free Nomad on Unsplash

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