: la magia de la música en nuestras vidas La musique, un chant du cœur qui enchante nos vies

« Norma » de Bellini : un chef-d’œuvre du bel canto italien au Teatro de la Maestranza

La saison lyrique du Teatro de la Maestranza de Séville a débuté en grande pompe avec une représentation exceptionnelle de l’opéra « Norma » de Vincenzo Bellini. Samedi 12 novembre, les spectateurs ont pu apprécier une production riche en émotions, avec une distribution de grands noms du chant lyrique.

Une sœur, une fille, une mère : l’empreinte de « Norma » dans la vie de Pauline Viardot

Louise Hérrite, fille de Pauline Viardot, raconte que sa mère, après plusieurs jours inconsciente, n’a prononcé qu’un seul mot avant de mourir : « Norma ». Ce moment a dû rappeler à sa mémoire ses débuts dans le rôle, à Grenade, à l’âge de 22 ans. Elle craignait toujours la comparaison avec sa sœur, la tragiquement disparue María Malibrán, qui était pour elle la Norma de référence. Bien que Pauline Viardot n’ait pas souvent interprété ce personnage, elle l’avait toujours en mémoire et il est devenu son dernier souvenir. À chaque reprise de cet opéra, nous ressentons la même chose : un sentiment de stupeur face à la puissance musicale, une profonde émotion devant l’extrême intensité de l’intrigue. Cela s’explique notamment par l’association d’un livret d’une beauté poétique incomparable avec une musique d’une inspiration inégalable. Il n’est donc pas étonnant que, avec les interprètes adéquats, cette œuvre soit assurée de rencontrer le succès dans n’importe quel théâtre.

Un drame intemporel

À première vue, le choix de situer l’action au XIXe siècle, avec des crinolines, des uniformes et des bersagliers, peut sembler étrange au regard d’un livret qui évoque les Romains, les Gaulois, les druides et les prêtresses. Pourtant, Nicola Berloffa a décidé de dépasser cette littéralité et de replacer le drame dans le contexte de sa création, du point de vue d’une Italie en quête d’unité et d’indépendance face à des forces opprimantes. Ainsi, une dimension supplémentaire s’ajoute à l’intrigue (hypotexte), le metteur en scène établissant de nombreuses relations d’intertextualité qui donnent cohérence à sa proposition : un palais de style Renaissance bombardé, des Italiens aspirant à libérer leur patrie de l’occupant. Le magnifique travail sur les costumes et les éclairages, avec des jeux d’ombres et de lumières suggestifs, ainsi qu’une direction d’acteurs soigneusement étudiée, rendent cette production plus actuelle que jamais. Surtout avec cette fin encore plus tragique, où la mort sur le bûcher de Norma et Pollione est remplacée par la vengeance populaire, comme une sorte d’Euménides.

Une direction musicale magistrale, un trio de solistes d’exception

Yves Abel, déjà remarqué l’année précédente à Séville pour sa direction de l’opéra « Roberto Devereux », démontre ici sa maîtrise des subtilités du bel canto. Son talent a même été surpassé pour cette production, où il réussit à donner du relief aux moments les plus dramatiques de la partition sans jamais couvrir les voix. Il chante et respire avec les solistes, soutient des rythmes vifs et vibrants, sans aucune faiblesse ou affectation. Sous sa baguette, l’Orchestre Symphonique de Séville sonne avec une finesse et une transparence rares. Les trois dernières apparitions de Yolanda Auyanet au Teatro de la Maestranza (dans « Roberto Devereux », « Tosca » et « Norma ») ont été un véritable succès. Avec sa voix lyrique et son centre vocal en or, elle dessine un personnage brisé par la douleur, où l’amour (pour Pollione et ses enfants) dépasse la soif de vengeance. Avec un phrasé délicat et un souffle constant, elle a su éviter les notes difficiles en hauteur (bien qu’elle ait forcé quelques-unes d’entre elles) et en bas du spectre. Son chant, toujours porté par son souffle, lui a permis de proposer une magnifique interprétation de « Casta diva », mais aussi de conserver le contrôle nécessaire au dramatisme du début du deuxième acte. Les plus beaux moments ont été le duo formé avec Raffaella Lupinacci, dont la voix veloutée aux nuances sombres et à l’émission cristalline a fait preuve d’un legato admirable, délicat et capable de subtiles variations dans les reprises des cabalettes. Sans oublier sa facilité avec la colorature (bien que l’on aurait aimé davantage de variations dans celles-ci, aussi bien chez elle que chez Auyanet). Le trio de solistes est complété par Francesco de Muro, tout en lyrisme et en puissance dans son phrasé, doté d’une projection impeccable et de solides aigus, comme en témoignent les longues tenues de « La natural sobre gl’incensi » et le brillant « Si bemol en abbaterò ». La voix tremblante et creuse de Rubén Amoretti dans le rôle d’Oroveso a été compensée par l’impressionnante stature de Nestor Galvan. Mireia Pintó a également fait preuve d’une efficacité et d’un professionnalisme remarquables. Enfin, un nouveau triomphe du chœur magnifique et puissant, actuellement à son apogée.

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